
Belle et chienne la vie

Les yeux vont piquer. La soirée va être longue. Et rien qu'à lire les titres des chansons candidates à l'Eurovision 2016, on ne va pas révolutionner le métier de parolier. La couleur de ta vie, Le son du silence, T'aider à voler, L'amour c'est… Baudelaire et Rimbaud se retournent dans leur tombe et Joëlle Scoriels accueille ce soir, à neuf jours de la finale du grand show halluciné, celle qui reste la seule Belge à avoir gagné l'Eurovision. Sandra Kim risque bien de charcuter sévèrement le concours kitsch, comme elle l'a fait dans nos colonnes il y a trois ans: "Les chansons sont ridicules et les gens viennent en jogging".
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Il y a pile-poil trente ans, Sandra Kim déboule avec un papillon rose autour d'un cou nu, un veston blanc aux épaulettes de quarterback encadrant sa frêle silhouette d'ado. Elle glane 176 points, gros score, et réalise une des plus éclatantes performances dans le monde du travail des enfants. En effet, elle n'a que 13 ans, vient à peine d'être naturalisée belge et son sacre crée une polémique. Sa chanson, pourtant, est pleine de bon sens pour une si jeune fille: "Devant Jacques Brel, devant Mozart, je m'sens petite, j'ai le cafard". Mais ils sont oubliés au couplet suivant, une fois l'amour trouvé, avouons-le. S'ensuivent deux ans de succès intense. Bien accrochée à l'existence, c'est elle qui chante le générique de Il était une fois… la vie.
Puis, les choses se tassent, mais prédisent aussi le showbiz belge actuel. Elle participe à Dix qu'on aime, à Pour la gloire, enchaîne les galas pour continuer à vivre de la chanson. Chose rare pour une Liégeoise d'origine italienne, elle s'installe en Flandre, où elle tisse la suite de sa carrière. Seul regret, pour celle qui a sorti "Make Up" en 2011 avec quelques pointures belges du songwriting: ne pas avoir eu d'enfants. Auscultée par Sans chichis, la question demeure: est-ce qu'"au total, à l'addition", Sandra Kim "aime l'horizon"?