
Un homme en or

Lundi 23 mai 2016. Un petit homme, octogénaire depuis peu, est assis dans le TGV qui relie Cannes à Paris. Un passager ordinaire parmi tous les autres… à un détail près: il s’agit de Ken Loach, qui depuis la veille au soir a rejoint le cercle très fermé des réalisateurs ayant remporté deux fois la précieuse Palme d’or. Tout juste dix ans après Le vent se lève, le Britannique monte donc à nouveau sur la plus haute marche du podium cannois, pour un drame poignant racontant l’histoire d’un homme à l’aube de la soixantaine qui, victime de problèmes cardiaques, se voit coincé par un système administratif kafkaïen. Porté par de remarquables interprètes, le film décrit une réalité implacable à laquelle de nombreux citoyens se sont déjà retrouvés confrontés. C’est sans doute une des raisons pour lesquelles il sonne si juste, évitant de verser dans le pathos tout en réservant quelques beaux moments d’émotion empreints d’une folle humanité.
La lecture de votre article continue ci-dessous
En observateur avisé de la société contemporaine et de ses laissés-pour-compte, le réalisateur ne manqua pas de tenir des propos engagés lors de son discours de remerciement: “Nous sommes au bord d’un projet d’austérité conduit par des idées que nous appelons néolibérales et qui risquent de nous mener à la catastrophe. Nous devons dire qu’autre chose est possible. Un autre monde est possible et même nécessaire.” Un constat plein de lucidité pour un homme qui n’a jamais perdu sa modestie, quels que soient les lauriers récoltés: “Une récompense ne revient pas uniquement à son réalisateur, elle revient à toute la troupe du film. C’est un peu comme une équipe de foot dont je serais le capitaine. Jamais je ne me sentirai important parce que j’ai gagné un prix, il faut être stupide pour se croire plus important qu’un autre.” Mais le message que Ken Loach cherche à faire passer dans ses films, lui, garde toute son importance!