She-Hulk, dernière série des studios Marvel: bientôt la saturation?

Avec le souriant She-Hulk, Disney continue dans l’ultra-populaire filon des super-héros Marvel. Tirer profit des licences à succès est la stratégie qui en a fait le nouveau numéro un du streaming.

she hulk
© Marvel

La déferlante Marvel n’est pas près de s’arrêter. En 2021, après 22 films en 11 ans, l’infinie saga cinématographique de l’éditeur américain de BD lançait sa “phase 4”. Désormais, l’univers des longs-métrages s’étendrait aux petits écrans. Pour ne rien rater de cette épopée super-héroïque, un abonnement à Disney+ est impératif. Dix-huit mois plus tard, 7 séries, soit 48 épisodes, sont déjà disponibles. La huitième vient d’arriver. She-Hulk (Miss Hulk en V.F.) raconte l’histoire de Jennifer Walters, avocate se retrouvant ­involontairement avec des pouvoirs similaires à ceux de Hulk/Bruce Banner (son cousin). Avec elle, ­Marvel Studios propose sa première série comique.

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Je me suis demandé si elle existait vraiment, cette ­trentenaire qui travaille, qui a une carrière et qui se retrouve avec des super-pouvoirs sans avoir rien demandé à personne, comment réagirait-elle? Moi, je serais furieuse. Non merci, je passe mon tour! C’est cette histoire que je voulais montrer, explique Jessica Gao, sa créatrice et sa scénariste (Silicon Valley, Rick et Morty). Peu importe de vouloir des pouvoirs ou pas, quand ça vous arrive, ça a des conséquences sur votre travail, vos collègues, vos amis, votre famille… Mais aussi sur comment vous voyez le monde et comment le monde vous voit.

Un pitch relativement éloigné des scénarios souvent cataclysmiques de l’univers Marvel, que seul un ­format épisodique permet. “Entre ces immenses ­catastrophes à gérer, les super-héros doivent aller voir leurs parents, payer leurs factures, nettoyer leurs salles de bains… Comme tout le monde. C’est dans ce cadre que je voulais inscrire la série.

Un tel script fait penser à Ally McBeal, mais comme inspiration, Jessica Gao cite plutôt l’excellent Better Call Saul, qui montre la lente transformation du jeune escroc Jimmy McGill en Saul Goodman, l’avocat véreux de Breaking Bad, mais aussi Insecure et Fleabag, deux “dramédies” qui se démarquent par leur humour et leurs personnages brillamment écrits.

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Diversité dans le multivers

Comédie au casting féminin, She-Hulk est un bon exemple de la stratégie Marvel actuelle. Bien qu’ils soient les rois du box-office, ses films sont souvent jugés trop blancs, trop masculins, trop homo­gènes… Depuis plusieurs années, le studio tente de renverser la tendance. On retrouve désormais plus de héros féminins (Black Widow, Captain Marvel…) ou aux origines plus variées (Black Panther, Shang-Chi, Eternals). Ses séries permettent en tout cas de proposer autre chose que des films d’action à grand spectacle. La première d’entre elles, Wandavision analysait le deuil de la sorcière Scarlet Witch à travers un hommage aux sitcoms cultes. Loki plaçait le frère et rival de Thor dans un thriller à travers les dimensions. Moon Knight explorait des thèmes comme le dédoublement de personnalité et la mythologie égyptienne. Et dernièrement, Miss ­Marvel nous faisait découvrir le monde des super-héros dans les yeux d’une jeune ado geek d’origine pakistanaise, entre traditions familiales, islam et désir d’émancipation. Les bonnes intentions sont là, mais le changement n’est pas encore bouleversant. Combats et affrontements continuent de faire le sel de tous ces films et séries, ce qui continue de rebuter une partie du grand public.

L’autre pan de la stratégie de Marvel est son omniprésence. Lorsqu’une série se termine, un film s’annonce à l’affiche. Quand il disparaît des salles, de nouveaux épisodes ne sont pas loin. Avant la crise du Covid, sur une seule année, on pouvait retrouver 2 ou 3 longs-métrages du studio à l’affiche, un rythme inégalé pour une saga dont tous les films sont en plus reliés entre eux. Après la pause pandémie, Kevin Feige, tête pensante, coordinateur et big boss, est passé à la vitesse supérieure: 4 films et 5 séries en 2021, 3 films et 3 séries en 2022. Et peut-être encore des surprises, nous ne sommes qu’en août. Avec une telle fréquence, cela fait déjà un moment que presse et spécialistes prédisent une “Marvel fatigue”. On se dit que le public finira par se lasser de cet abreuvage constant et d’une recette qui n’évolue guère. Mais cette hypothèse du ras-le-bol est toujours contredite par d’impressionnants résultats au box-office. En décembre, Spider-Man: No Way Home est même devenu le 6e plus gros succès de tous les temps.

Vers l’infini…

L’avalanche annuelle Marvel s’inscrit en fait dans la stratégie streaming choisie par Disney, sa maison mère. Disney+ fait partie des dernières arrivées sur un marché où chaque plateforme se distingue par une méthode propre. Le géant Netflix mise sur la quantité. Prime Video en est l’alternative avec des films et des séries plus exceptionnels, voire de niche. Apple TV+ a choisi le prestige avec un catalogue réduit et une seule nouveauté très haut de gamme par semaine. Face à cela, Disney+ joue la carte de l’exclusivité et de la continuité. Grâce à un catalogue particulièrement riche et apprécié (tous les Disney, les Pixar, les ­Simpson…), il a débarqué avec une base solide. Et il y ajoute constamment du contenu autour de Star Wars et Marvel, ses licences phare et exclusives.

La plateforme devient donc le seul et unique endroit où retrouver, à la demande, ces univers ultra- appréciés, mais aussi où découvrir les séries exclusives qui les complètent. Outre ces immenses machines, Disney+ peut aussi compter sur les programmes de ses diffuseurs américains (ABC, Fox, Hulu) et sur du contenu original plus adulte. Une stratégie gagnante puisque 14,4 millions de clients supplémentaires se sont inscrits à Disney+ entre mars et juin, pour un total de 152,2 millions d’abonnés. Si on ajoute les plateformes américaines (ESPN, Hulu…), l’entreprise Disney dépasse désormais les 221 millions de souscriptions, barre sous laquelle vient de descendre Netflix, désormais numéro deux.

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