
Ivan, nouvel animateur vedette de la RTBF: «C’est beaucoup de boulot mais j’y suis arrivé»

En arrivant dans les bureaux de la RTBF à Bruxelles, c’est un homme comblé que l’on rencontre. Passionné des médias depuis son enfance, Ivan vient seulement de souffler ses 25 bougies, mais il est déjà ému en se remémorant son parcours en radio et en télé. Au milieu des années 2000, lui et sa mère s’émerveillaient devant les émissions de télé-réalité qu’ils découvraient en arrivant du Rwanda. Aujourd’hui, il coanime un grand «talent show» sur la première chaîne belge, «The Dancer». «Encore maintenant, je ne me rends pas tout à fait compte que je travaille dans mon rêve. Mon cerveau ne se dit pas ‘C’est toi à l’écran’», nous confie-t-il.
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Pourtant, il a déjà un sacré CV. Il peut se prévaloir d'avoir été le plus jeune matinalier de l'histoire de Tipik en radio (qui s'appelait Pure lors de son arrivée en 2019). Passé depuis sur le petit écran, il fait aujourd'hui figure d'étoile montante de la télé. Et même s'il n'y avait pas pensé auparavant, plusieurs personnes lui ont fait remarquer qu'il était l'un des rares (voire le premier) animateurs noirs en Belgique francophone. À part lui, on peine à trouver d'autres exemples, si ce n'est par exemple l'ancienne présentatrice de la météo, Cécile Djunga. Mais pour arriver là, il a dû travailler dur, très dur.
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Quand une rencontre fortuite forge un destin
Quand on lui demande d’où vient sa passion pour les médias, il n’hésite pas: c’est sa mère. Les soirées étaient rythmées par les rituels télé et la radio servait presque de berceuse avant d’aller dormir. Déjà à l’époque, il s’intéresse à tous les petits détails du milieu: le choix des animateurs, les changements sur les plateaux télé, etc. Puis comme beaucoup de jeunes, il adore les sitcoms de Disney Channel. D’où son rêve à l’époque de devenir acteur, pas animateur. «La télé, je me disais que c’était trop gros, que c’était réservé à certaines personnes destinées à cela et que ce n’était pas un monde pour nous».
Il ne se trouve pas si bon comédien que ça mais qu’importe, il imagine suivre cette direction. Un jour, il doit se rendre à un examen d’entrée pour une école de théâtre mais sur le chemin, le destin lui fait prendre une autre voie. Il croise dans la rue un animateur de Fun Radio, Vinz, le reconnaît et va lui parler. Comprenant l'intérêt du jeune Ivan pour la radio, Vinz l’invite à le retrouver en studio. «J’y ai été une, deux, trois fois et je me suis ‘Mais c’est génial! C’est ça que j’ai envie de faire’». Il finit par décrocher un petit stage là-bas, pour préparer les émissions le soir. Il n'avait que 15 ans et était encore en 4e secondaire.
Le chemin vers la RTBF
Commence alors l'engrenage qui lancera sa carrière. En déménageant à Woluwe-Saint-Lambert, il reçoit un folder: la commune cherche des jeunes pour animer Radio Tamtam, gérée par la maison de la jeunesse de la localité. Avec des amis, il s'y investit et renouvelle les locaux pour en faire une nouvelle station, Dynamic One. Il termine ses secondaires avec un agenda de ministre (comme c'est le cas encore aujourd'hui). Il fait office de professeur de radio à 17-18 ans, tout en se continuant à se former lui-même en autodidacte, sans compter qu'il finira par décrocher un vrai boulot chez Fun Radio. Une fois l'école finie, il tente l'IHECS mais laisse tomber après un trimestre. «Je n’avais pas le temps, et c’était un peu prendre des cours pour faire ce que je savais déjà faire. Ça n’avait pas de sens et puis les études, ce n’était pas du tout pour moi, bien que je sois hyper admiratif des étudiants», nous dit-il.
Ce petit détour en haute école ne l'empêchera pas de décrocher des opportunités, à force de postuler partout. Il anime par exemple une édition matinale sur NRJ Hits pour présenter les clips. C'est sa toute première expérience télé. Puis il lance en octobre 2018 AZAP, un site qui suit l'actualité des médias en Belgique francophone (et qu'il continue aujourd'hui de superviser). Enfin, le 6 juillet 2019, son CV ayant attiré l'attention de la RTBF, il arrive sur Pure. «Il se trouve qu’ils cherchaient un animateur pour les week-ends de l’été, d’où cette première émission. Cela devait juste durer l’été mais puisque ça s’est bien passé, ils ont eu envie de me donner une case le week-end pendant la saison. J’ai dis ‘ok’ et voilà». Les portes du service public s'ouvrent pour lui, et ce n'est qu'un début.
De la radio à la télé en un temps record
Se produit alors un incroyable concours de circonstances qui propulse sa carrière à la vitesse de l'éclair. Pure entamant sa métamorphose pour devenir Tipik, il est amené à faire de nombreux remplacements. Il devient joker de la matinale puis début 2020, le Covid arrive. Il est alors invité à gérer de plus en plus fréquemment la matinale, au point de devenir un animateur principal par la force des choses. «En fait, 2020 a été une année super pour moi professionnellement parlant. Ça a été une expérience dingue, même si ça faisait beaucoup sur les épaules, parce que tout le monde était chez soi et énormément de gens suivaient les médias. Il y avait une ambiance hyper particulière. Plein de gens m’ont dit ‘Heureusement que t’étais là car tu as fait partie des gens grâce auxquels on a tenu’. Je ne me suis jamais senti aussi utile qu’à ce moment-là».
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Le hasard veut aussi qu'à ce moment-là, La Deux prenant là aussi le nom de Tipik, la RTBF cherche des «millenials» pour représenter la nouvelle chaîne. Ivan passe des castings et est retenu pour une toute nouvelle émission importée de Flandre, l'«Escape Show». Cette fois, il entre définitivement sur le petit écran.
Son agenda, déjà bien serré, commence à se faire très chargé, trop même. Il fait alors un choix pour se donner un peu d'air: quitter son poste d'animateur radio, au grand désarroi de Tipik qui voulait le garder. «La radio me bloquait pour faire d’autres choses en télé et j’avais envie de retrouver un boulot en équipe. J’ai donc pris le risque d’arrêter, et advienne que pourra. Les étoiles étant bien alignées, deux jours avant que j’arrête Tipik, je reçois un appel pour faire un test pour 'The Dancer' avec Sarah De Paduwa». Peu de temps après, il apprend qu’il s’agit de l’adaptation de la franchise britannique «The Greatest Dancer», que lui et sa mère adorent. «Je me disais ‘C’est pour toi’. Et fin août, on m’a appelé pour dire que j’étais pris. J’ai raccroché et j’ai hurlé. C’était dingue».
@ivanmtbzDes potes heureux pour toi comme ça ou rien 😍♬ son original - IVAN
Ému de ses accomplissements jusqu’aux larmes
Avec toutes ces réussites, Ivan remplit petit à petit les cases de la «to do list» qu'il s'est faite. «Je fais à chaque fois un récapitulatif des activités de l’année écoulée et je me dis ‘Mais mec, t’as fait tout ça!’. Quand l’Escape Show est arrivé, c’était comme un rêve qui se réalisait. Je suis trop content de voir l’envers du décor, avec les coulisses, l’oreillette, le prompteur, etc. Puis travailler avec Cathy, Sarah et d’autres, c’est une chance immense!», se réjouit-il.
À lire: Sara De Paduwa à propos de The Dancer : «La danse fait passer un message sans un mot, c'est bluffant»
«L’autre jour, quand on a tourné la demi-finale de 'The Dancer', j’ai versé une petite larme. Je suis arrivé en coulisses et j’ai vu les danseurs en train de se préparer, les assistants trop gentils, mon nom sur le prompteur et le public où moi j’étais avant. Je me suis dit ‘Il se passe quelque chose de fou’ et je me suis caché pour verser cette larme. La production n’est même pas au courant!».
Un animateur apprécié qui croise les doigts pour la suite
Maintenant qu’il est sous le feu des projecteurs, de plus en plus de personnes lui font aussi remarquer sa position notable d'animateur noir à la télé belge, une véritable exception dans le paysage audiovisuel. «Là où c’est une petite fierté, ce n’est pas tant pour moi, mais c’est lorsque je croise des gens dans la rue qui me disent ‘Ça fait du bien d’avoir de la diversité et de se sentir représenté’. La télévision est censée être le reflet de la société et si on ne s’y retrouve pas, on a l’impression de ne pas être pris en compte. C’est comme si on ne voyait pas son reflet dans un miroir. Ce n’est pas que de la faute de la télé, de la production, des chaînes ou de la presse. C’est un contexte et des petites causes qui s’agrègent. Mais moi, je n’ai jamais avancé en me disant tout ça à propos de moi».
Ce dont Ivan est encore plus fier, c’est cette liste de rêves devenus réalité. «C’est beaucoup de boulot mais j’y suis arrivé. Il y a eu un mélange de chance et de travail mais en tout cas, aujourd’hui, je suis content», confie-t-il. Le symbole de cette réussite: le fait d'avoir pu accueillir son père et sa mère sur le plateau de l'«Escape Show». «Ce moment-là restera un des plus beaux moments de ma vie. C’est la première fois que mon père venait en Belgique depuis le Rwanda, que je le voyais réuni avec ma mère, et que je pouvais dire ‘mes parents’ et non ‘mon père et ‘ma mère’ séparément. Tout était fou».
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Aujourd’hui, sa philosophie pour la suite de sa carrière, c’est de suivre la «vibe» du moment comme il dit, en voyant ensuite où cela le mènera. «J’espère que l’Escape Show et The Dancer continueront, et que je serais toujours là parce que ma place n’est pas acquise», note-il quand même. «Arrivé à ce stade, on se dit ‘Qu’est-ce qui pourrait être plus dingue que ça?’ et en même temps, ce n’est que le début, donc il faut qu’il y ait des trucs plus dingues. Je suis sur une belle chaîne, avec une belle production, et quand t’as ça, tu te dis que tout ce qui se passe, ce n’est que du plus».