Hezbollah, l'enquête interdite : le documentaire immanquable sur la mafia chiite

Diffusion le 5 février à 20h50 sur France 5

Depuis l’explosion dans le port de ­Beyrouth en 2020, une question demeure: qui est responsable de cette catastrophe? Officiellement, le fautif est un cargo ayant transporté du nitrate d’ammonium. Mais ce que tendent à montrer des enquêtes indépen­dantes, c’est que ce stock serait lié au Hezbollah, lorsque ce parti chiite libanais lié à l’Iran rassemblait des armes pour soutenir Bachar el-Assad. Une révélation choquante qui en amène une autre: depuis les années 1990 au moins, et ce encore durant la guerre en Syrie, le Hezbollah se finançait grâce… au narcotrafic!

C’est la conclusion de l’excellent travail des journalistes Jérôme Fritel et Sofia Amara. Pour démontrer cette thèse, ils ont pu se baser sur les découvertes de la DEA, l’agence de lutte antidrogue américaine. Cela leur permet ici de dessiner petit à petit tout un réseau mafieux mondial qui permet au Hezbollah de prospérer. On découvre des militants du parti dans le milieu de la cocaïne en Colombie, puis d’autres blanchissant l’argent en France et en ­Afrique de l’Ouest, et enfin des membres du ­mouvement achetant des armes en Europe de l’Est. Les Libanais sont aussi perdants. Avec les narcodollars, le Hezbollah a pu contrôler de larges pans de leur pays: les banques, les grandes industries, puis de facto l’État.

On est donc surpris par l’ampleur de ces révélations. On s’attend à une enquête cantonnée à une organisation dans un Liban très lointain pour se rendre compte que le Hezbollah a un pouvoir de nuisance planétaire. Une zone d’ombre de la poli­tique libanaise, de la géopolitique internationale et du trafic de drogues s’éclaircit. Si on ne devait faire qu’un reproche à ce docu de trois épisodes, c’est que le premier d’entre eux est surtout consacré à rappeler le contexte de l’émergence du Hezbollah. Ceux qui connaissent déjà cette histoire pourraient presque le passer. Pour le reste, l’émission est magistrale et pose une question essentielle: le ­Hezbollah agira-t-il encore longtemps en toute impunité, alors que l’Occident a mis un terme à l’opération de la DEA visant ce parti afin de plaire à Téhéran?