Le narcissisme c'est bon pour la santé

Pour éviter le burn out et un trop grand sentiment de culpabilité, jetez un oeil sur le livre de Fabrice Midal  "Sauvez votre peau! Devenez narcissique"  Il y a de l’idée...

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Notre époque est profondément marquée par l’individualisme. Mais voilà qu’un livre vient affirmer qu’on se trompe complètement. Au contraire, terrassé par une culpabilité permanente, on ne s’aimerait pas suffisamment. Les mères ne seraient jamais d’assez bonnes mères, les travailleurs jamais assez productifs et les jolies filles jamais assez jolies. Conséquence? Les taux de dépression et de burn out explosent. Dans Sauvez votre peau! Devenez narcissique, Fabrice Midal offre un conseil pour le moins déconcertant en guise de remède: devenez narcissique. Fou de mythologie, le philosophe, qui a aussi fondé l’École européenne de méditation, s’est d’ailleurs replongé dans l’histoire de Narcisse pour y déceler son véritable sens. Oser dire aux gens d’être encore plus narcissiques...

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Vous avez un certain toupet.
FABRICE MIDAL - Pour tout le monde, “narcissique” est une insulte. Il s’agirait d’être nombriliste et de se couper des autres. Pendant longtemps, j’ai pensé ça aussi. Mais c’est très culpabilisant de douter de soi, de ne pas oser s’affirmer et de se sentir coupable de ne pas en faire assez. C’est même tout sauf narcissique. Je suis donc allé voir du côté du mythe de Narcisse.

Qu’avez-vous découvert?
Figurez-vous que j’ai été très surpris. Le terme narcissique est devenu le contraire de ce que nous enseigne le mythe. En réalité, Narcisse, quand il se regarde dans le lac, est incapable de se reconnaître. Et quand il va finalement se reconnaître, il renaît. C’est une métamorphose, comme la fleur de Narcisse. Elle symbolise la renaissance, mais également le passage de la méconnaissance à la connaissance. Ce qui rejoint la phrase de Socrate “Connais-toi toi-même”, qui ne signifie pas “Regarde ton nombril”, mais plutôt “Connais ta propre humanité ”.

Tout le monde dit pourtant que l’époque est particulièrement narcissique...
Ce qu’on pourrait appeler le mauvais narcissisme est en réalité la vanité. Mais il ne peut pas y avoir de mauvais narcissisme, puisqu’il n’y a pas de mauvaise manière de s’aimer. On est arrivé à un point où l’on pense qu’on pourrait s’aimer trop.

Comment serait-ce possible?
Plus on aime, mieux c’est. L’amour est toujours juste. Quand on aime trop “mal”, ça veut dire qu’on tombe dans la possession ou la manipulation. Mais ce n’est plus de l’amour.

Et Trump, n’est-ce pas le Narcisse moderne par excellence?
Trump est un exemple très éclairant. Il n’est pas narcissique car il recherche sans cesse la confirmation auprès des autres qu’il est génial. S’il était en paix avec lui-même, il ne serait pas dans l’ultra-réaction à la moindre critique. Son comportement témoigne d’une insécurité pathologique. Il ne s’aime pas. Il veut correspondre à une image idéale de lui-même, au lieu d’être simplement lui-même. Il est maquillé, perruqué… C’est absurde.

Mais concrètement, comment fait-on pour éviter cela?
L’enjeu, ce n’est pas de contrôler sa vie, mais d’écouter les ressources qui sont en nous. Il faut juste prendre conscience qu’on est beaucoup moins coupables que ce qu’on nous dit. Les gens qui font un burn out, c’est parce qu’ils veulent trop bien faire. Ils sont victimes d’une société qui les pousse à bout. Quand quelqu’un panique, on lui dit qu’il ferait mieux de gérer ce stress. C’est toujours la double peine. On nous stresse et après on est coupables parce qu’on est trop stressés.

N’est-ce pas monstrueux? Votre livre, c’est un antidote au burn out?
Au burn out, à la détresse, au sentiment de culpabilité... Moi, je suis pour réhabiliter le fait d’oser dire “je”. Quand on parle de soi sincèrement, on touche l’humanité profonde. Les gens se cachent derrière un “nous” parce qu’ils pensent que pour être génial, il faut être comme Einstein. Pourtant, tout être humain a un génie en soi. Pendant longtemps, je m’en serais voulu de dire “je”, mais je me suis rendu compte que j’avais le droit de sauver ma peau. Avec ce bouquin, j’essaie de montrer aux gens une réalité qui existe et qu’on nous cache. Chacun pense qu’il n’est pas suffisamment altruiste. Mais on ne s’ouvre pas aux autres en se sentant coupable. On s’ouvre aux autres parce qu’on est en paix avec soi-même.

Il faut accepter les échecs?
C’est important d’accepter qu’il y a des moments où on est malheureux. Il y a des moments où l’on pleure, où l’on est désespéré, où l’on est jaloux. Et il existe tout un discours pour nous dire que c’est une faute. Il faudrait qu’on soit lisse, ou pire, qu’on soit calme. Je ne supporte plus ce terme. Quand la mer est calme, les marins ne peuvent plus avancer. Il faut des hauts et des bas. C’est comme si un enfant qui apprenait à marcher se disait “je suis tombé, je me sens humilié, je ne bouge plus”. C’est insensé. C’est par les échecs qu’on apprend à grandir.

Ce bouquin a été écrit par quelqu’un qui ne s’aime pas, pour des gens qui ne s’aiment pas?
Non, ce livre a été écrit par quelqu’un qui voit l’enfermement dont il a eu lui-même à se libérer pour des gens qui ont eux-mêmes à se libérer. Parce qu’au fond, on ne s’aime jamais entièrement. On a toujours à réapprendre à s’aimer.

@D.R.

SAUVEZ VOTRE PEAU! DEVENEZ NARCISSIQUE
Flammarion, 192 p.

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