
Ce week-end, en route pour une balade au marais d'Harchies

Au bord d’un chemin en terre battue qui traverse de part et d’autre un des trois étangs du marais d’Harchies, un couple de jeunes retraités s’active en silence, lui à la caméra, elle lui tenant une perche. Que tentent-ils de capter? Peut-être ce héron perché, au loin, sur une souche? À moins que ce ne soient les reflets de la lumière dans les belles roselières où barbote un colvert? “Nous venons régulièrement de France, pas loin d’ici, juste après la frontière. On ne s’en lasse pas” dit l’épouse, presque en chuchotant, car “il ne faut pas déranger les oiseaux”. Avant cela, depuis un des sept observatoires qui ponctuent le site, ils ont aperçu un martin-pêcheur. On s’empresse d’y aller. À l’abri de cet observatoire, on peut voir sans être vu, sans déranger. Et effectivement, le martin-pêcheur, un des oiseaux les plus colorés de nos régions, est toujours là, sur une branche de saule.
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En revanche, pour entrevoir la gorgebleue à miroir, emblème du marais d’Harchies, site majeur pour l’avifaune (environ 550 ha), il faudra revenir. Ou avoir plus de chance peut-être en participant par exemple à l’une ou l’autre visite organisée par le CRIE (le Centre régional d’initiation à l’environnement) d’Harchies. En partenariat avec Natagora, tout y est mis en œuvre pour conscientiser le public, et inciter, notamment les jeunes, à développer des gestes écocitoyens. Et à respecter la biodiversité de cette zone humide de la vallée de la Haine, créée à la fois par d’anciens effondrements miniers et la remontée de la nappe aquatique.
Reconnaissance internationale
Plus de 200 espèces, dont certaines particulièrement rares, ont déjà été observées sur le site du marais hennuyer. Lieu de nidification, Harchies joue aussi un rôle primordial lors des haltes migratoires. Les oiseaux viennent s’y reposer, s’y nourrir avant de poursuivre leur route. Les uns migrent vers le sud, d’autres volent vers le nord. Les marais accueillent aussi nombre de libellules. Cette belle richesse biologique a valu à ce site belge à la fois une reconnaissance internationale (zone “Ramsar” du nom du lieu où fut signée la convention), une reconnaissance européenne (Natura 2000) et aussi wallonne (Zone humide d’intérêt biologique - ZHIB).
“Ce n’est pas rien, dit François Van Driessche, animateur nature et formateur au CRIE d’Harchies. Vous comprendrez dès lors que, par respect pour ce lieu unique, le mot “tourisme” nous fait parfois un peu peur quand il renvoie à de trop grands rassemblements, au bruit, à l’inconfort, voire à des débordements que, même sans aucune mauvaise intention, ces activités peuvent générer de la part du public. Nous essayons de canaliser cela. De conscientiser les gens lors de visites guidées, de stages. Faire com- prendre que sur ce genre de site, les équilibres sont délicats. Et surtout que nous, les humains, on n’y est pas chez nous. Et je peux vous assurer que, lorsqu’on est sur place, on comprend mieux, et même avec une certaine humilité, ce que cela veut dire.”
Vie, mort et équilibre
Et l’animateur de mettre l’accent sur tout un travail de gestion, peu visible sans doute, qui s’y pratique au quotidien, entre scientifiques, forestiers, agriculteurs, pédagogues, pour favoriser la biodiversité. “Il faut par exemple réguler les niveaux d’eau des différents étangs.” Sur les bas-côtés, dans les zones plus boisées, l’on aperçoit ci et là des arbres morts. Qu’en fait-on? “Dans ce cas-ci, on intervient généralement peu ou pas du tout. Les arbres morts sont essentiels pour une forêt vivante.” Derrière l’image d’un lieu apparemment paisible, voire paradisiaque, se joue un subtil équilibre entre le vivant et ce qui ne l’est pas. Le public actuel manifeste un réel intérêt pour la nature et en particulier le monde des oiseaux. “C’est vrai, reconnaît François Van Driessche. Mais cet engouement a aussi des effets pervers. Pour avoir une photo à tout prix, il peut arriver à un photographe passionné de planter le pied de son appareil n’importe où! Et en ce qui concerne cette passion proprement dite, je suis un peu dubitatif. Nous sommes dans une génération zapping, où l’on passe vite à d’autres choses. Il faut rester vigilant.” Et continuer à aller s’émerveiller dans ces lieux magiques, ici ou ailleurs où les oiseaux se posent, s’envolent, passent ou repassent.
Marais d’Harchies: CRIE d’Harchies, rue des Préaux 5, 7321 Harchies (Bernissart). On peut y obtenir un plan du site. Sinon, panneau explicatif à l’entrée (libre) du site. Parcours complet: 6,5 km. Sentiers en terre battue accessibles à tous (PMR et poussettes). Chiens (en laisse) autorisés. Le CRIE organise également des visites guidées des marais (+/- 3 heures), le premier et le troisième samedi du mois. Infos et réservation: 069/58.11.72. Plusieurs possibilités de restauration à Bernissart. www.natagora.be/crieharchie