LK-99: ce supraconducteur va-t-il vraiment changer le monde?

Des chercheurs affirment avoir créé un supraconducteur qui pourrait aboutir à de multiples innovations technologiques, du moins s'il remplit ses promesses.

LK-99
Un morceau de LK-99 ©Capture d’écran Facebook

Depuis quelques jours, un matériau fait l'objet d'un véritable buzz sur les réseaux sociaux. Derrière son nom quelque peu barbare de LK-99 et sa formule chimique chaotique, Pb9Cu(PO4)6O, se cache en réalité un supraconducteur des plus prometteurs. Dernièrement, des scientifiques sud-coréens du Quantum Energy Research Center de Séoul ont affirmé être parvenus à en créer un fonctionnant à température et pression ambiante, ce qui ouvrirait la porte à une future révolution technologique. Ce mélange d'apatite, de plomb, de cuivre, de phosphore et d'oxygène pourrait en effet représenter la clé pour repousser les limites du possible dans des domaines aussi diversifiés que l'industrie énergétique, spatiale, nucléaire, quantique, médicale, etc. Une avancée qui doit être toutefois relativisée, les obstacles étant encore nombreux.

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Une révolution technologique en vue?

Le début de l'histoire du LK-99 remonte à plus d'une vingtaine d'années. Ce matériau a été découvert en 1999 par deux chercheurs en supraconductivité dont les initiales ont servi à nommer cet étrange objet, Lee Seok-bae et Kim Ji-hoon. Ce n'est toutefois que récemment que leur composite a été reconnu comme tel. Enfin, il y a quelques jours, l'émoi était au rendez-vous lorsqu'est apparue une vidéo où l'on voit un échantillon de LK-99 partiellement en lévitation au-dessus d'un aimant. Cela serait la preuve des propriétés particulières de ce matériau vis-à-vis du champ magnétique, ce qui garantirait ses caractéristiques de supraconducteur.

Son intérêt principal réside dans le fait qu'il permettrait d'avoir un courant électrique sans dissipation de chaleur et donc d'énergie. Cela permettrait à une nouvelle génération de batteries de voir le jour, avec un stockage optimal de l'électricité. Plus besoin de refroidir les appareils utilisant des supraconducteurs! Fini aussi les supercalculateurs grands comme des armoires qui produisent une chaleur astronomique dans des buildings qui leur sont entièrement consacrés!

Il serait également possible d'imaginer des moyens de transport (notamment des trains) à lévitation magnétique, d'où une absence de frottements au sol et des capacités de vitesse accrues, le tout sans oublier la possibilité de voyager avec une émission carbone réduite au minimum. Les réseaux électriques seraient d'une efficacité inégalée jusqu'à présent. Les fusées disposeraient pour leur part de meilleurs propulseurs et de champs magnétiques protégeant des radiations solaires. Cela ouvre aussi la voie au perfectionnement de la fusion nucléaire, sans déchets à vie longue et avec une énergie décuplée. Et la liste des innovations pourrait être encore très longue.

Un matériau qui doit encore faire ses preuves

Oui, mais ça, c'est dans le meilleur des scénarios. Or pour l'instant, nous n'y sommes pas encore. Premier obstacle: l'annonce sud-coréenne doit être confirmée par d'autres chercheurs, et ce n'est pas gagné! En 2020, l’université du Nevada avait assuré avoir mis au point un supraconducteur similaire. Elle a rapidement déchanté, son étude présentant de sérieux défauts. Dans le cas de LK-99, le Dr. Sinéad Griffin du Lawrence Berkeley National Laboratory en Californie affirme au New York Times qu'il faut encore s'assurer qu'il s'agit bien du type de supraconducteur annoncé.

La vidéo de LK-99 montre également que le matériau ne lévite que partiellement. Est-ce que cela remet en cause ses capacités? Michael Norman, de l'Argonne National Laboratory, ne cache également pas son scepticisme quant au fait que LK-99 contient de l'apatite, c'est-à-dire un minéral. "Vous avez un caillou, et vous devriez toujours vous retrouver avec un caillou", dit-il à Science.

Il faut ensuite pouvoir reproduire le processus de fabrication, non seulement pour confirmer la découverte mais aussi pour confirmer la possibilité d'en créer à grande échelle. Car il ne suffit pas d'avoir un petit échantillon pour répondre aux besoins de l'humanité! Cette reproductibilité constituera l'un des points cruciaux de la validation de l'expérience scientifique.

Reste enfin à voir ce que cela donnera dans la pratique. Des obstacles supplémentaires pourraient apparaître lorsque ce supraconducteur sera utilisé. Ce n'est que s'il réussit à remplir toutes ses promesses que l'on pourra véritablement parler de révolution technologique. D'où la prudence mais aussi l'engouement de la communauté scientifique, qui ne demande qu'à être rassurée sur l'importance de cette découverte.

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